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Faut-il encore investir en Chine ?

Il ne faut pas chercher midi à quatorze heures : on est ici dans le dilemme classique entre rendement et risque. S’il est une chose que nous n’aimons pas, nous, les investisseurs, c’est bien l’interventionnisme des gouvernements. Il augmente le risque.

La Bourse de Sao Paulo est bien placée pour en témoigner. Il y a quelques mois, le président Bolsonaro a nommé un général à la tête de Petrobras. Le cours du géant pétrolier a aussitôt dévissé. Dès lors la question se pose en ces termes : l’augmentation du risque dû à l’interventionnisme des autorités chinoises est-elle encore acceptable ? La réponse du marché a été clairement ‘non’. Aujourd’hui, elle serait plutôt ‘oui, mais’…

C’est tout l’univers boursier chinois qui a tremblé

Depuis le 1er janvier dernier, l’indice MSCI China a perdu 12,18 %. Sur les trois derniers mois, la baisse est de 13,69 %. C’est gigantesque quand on sait que cet indice représente 85 % de l’univers des actions chinoises, en ce compris les ADR (American Depositary Receipt), les véhicules qui permettent d’investir en actions chinoises cotées à New York. Il faut parfois dire les choses avec insistance lorsque leur énormité semble ne pas passer la rampe : l’ensemble de l’univers boursier chinois a bel et bien perdu 12,18 % depuis le début de l’année.

Ce chiffre, aussi hénaurme qu’il soit, en cache d’autres bien pires encore. Ce sont surtout les valeurs chinoises cotées à New York qui ont bu la tasse. Ce sont les plus connues, genre Tencent, Alibaba et autres Baidu, qui ont littéralement dévissé. Cet été, la première et la deuxième avaient perdu en dollar 40 % par rapport à février, la troisième quasiment 55 %. Circonstance aggravante, ces valeurs, surtout les deux premières, font partie du top 5 des plus grosses capitalisations boursières chinoises.

Comment se fait-il que la Chine, dont tous les graphiques montrent qu’elle a été la première à s’extraire, et avec quel dynamisme, du drame économique dû à la pandémie (le MSCI China a clôturé 2020 sur une hausse proche de 30 %), ait pu prendre une claque boursière aussi terrible parce que son président, Xi Jinping, a décidé de siffler la fin de la récréation ? En fait, Xi Jinping a réagi en… bon communiste ! La comparaison vaut ce qu’elle vaut, mais, pour reprendre les mots d’Elio Di Rupo, on peut supposer que le président chinois ‘en a marre des parvenus’. Les milliardaires locaux, comme le célèbre Jack Ma, ne sont plus en odeur de sainteté. L’arrogance de ces oligarques irrite profondément le Chinois moyen.

De bien étranges sociétés de cours particuliers

C’est aussi à cause du coup de sang du président chinois que l’on a découvert l’importance qu’avaient prise dans la vie quotidienne chinoise des entreprises comme New Oriental Education & Technology Group et autres TAL Education, qui ne sont jamais que des institutions d’enseignement privées. La Chine, sur le modèle anglo-saxon, prépare dès leur jeune âge les meilleurs élèves des meilleures écoles aux études supérieures. Pour tenir le cap, les parents investissent dans des cours particuliers qui leur coûtent, dit-on, jusqu’à 10, voire 15 % de leur salaire. Comme quoi, même dans la Chine communiste on peut, pardon, on pouvait faire fortune avec des cours particuliers ! Les institutions dispensant ces formations étaient devenues des mastodontes. Par exemple, la capitalisation boursière de New Oriental Education, lorsqu’elle était au faîte de sa gloire à Wall Street, flirtait avec la barre des 15 milliards de dollars. Xi Jinping n’y a pas été avec le dos de la cuiller : mutatis mutandis, ces entreprises devront se transformer en… asbl !

Il y a encore autre chose, c’est certain. La toile de fond de ce grand coup de Kärcher est évidemment la guerre commerciale avec les Etats-Unis, qui ressemble de plus en plus à un pugilat au sommet pour la place de leader économique mondial. Les autorités chinoises apprécient de moins en moins que les investisseurs occidentaux préfèrent les actions chinoises cotées à Wall Street que celles cotées à Hong Kong ou sur une des nombreuses places boursières du continent chinois. Certains fonds avaient senti venir l’orage : ils sont parvenus à limiter les dégâts à un peu moins de 5 % parce que leurs gestionnaires se concentrent sur les actions cotées à Hong Kong et en Chine continentale. Or ce sont surtout les actions chinoises cotées offshore qui ont dégusté. Cela montre l’importance de la géopolitique dans la gestion d’un portefeuille. 

Un Lehman Brothers immobilier

A l’heure d’écrire ces lignes, le marché chinois est l’épicentre d’un nouveau tremblement de terre boursier. Le géant immobilier Evergrande, dont la capitalisation boursière est de plus de 5.000 milliards de dollars, a annoncé qu’il n’était plus en mesure de payer les charges d’intérêts sur ses dettes (plus de 300 milliards de dollars). Reuters parle d’un risque systémique, une sorte de Lehman Brothers immobilier made in China. Le gouvernement chinois va-t-il intervenir ? Il y a un mois, il a injecté 7 milliards de dollars dans le groupe financier Huarong, qui menaçait de s’effondrer. Là aussi, l’orgueil national est en jeu et on sait à quel point il peut être important.

La Chine est et reste un marché d’avenir. Il ne faut pas s’en détourner parce que le Parti communiste, de temps en temps, donne un coup de barre à gauche. Par contre, là comme ailleurs, la diversification est la mère de la porcelaine. Avec ce petit conseil : mieux vaut investir en actions chinoises cotées à Hong Kong ou sur une des Bourses du continent. Il y a des fonds dont c’est le métier. Votre conseiller financier est là pour vous éclairer.