L’inflation s’incruste, un taux d’intérêt US à 4% d’ici la fin de l’année. Le résumé de la semaine.
Goldwasser Exchange fait le point sur ce qu’il faut savoir pour commencer la semaine.
Le choc de l’inflation fait tanguer les marchés.
Bien orientées lundi, dans la foulée de la semaine précédente, les bourses ont brutalement chuté mardi en raison du mauvais chiffre de l’inflation du mois d’août aux Etats-Unis. Celle-ci a atteint 8,3% l’an malgré la baisse du prix de l’énergie alors que les experts attendaient 8,1%. C’est surtout l’inflation sous-jacente, hors énergie et produits alimentaires, qui inquiète les experts. Le S&P 500 a aussitôt dévissé de 4% et le Nasdaq de 5%. Les deux indices ont continué à décliner les jours suivants. Les technologiques ont été les plus touchées. La capitalisation d’Apple a fondu de 154 milliards de dollars dans la seule journée de mercredi (-5,9%). L’avertissement du transporteur FedEx qui pâtit du ralentissement économique sur les trois continents a également pesé sur la tendance. Le titre a perdu 21,5% vendredi et l’indice Dow Jones Transportation qui sert de baromètre à l’économie a perdu 9% en cinq jours. Un nombre croissant d’analystes estime que Wall Street va tester à nouveau le plus bas de l’année, soit 3.670 sur le S&P 500, une baisse de 6% par rapport au cours actuel. Sur la semaine, le S&P 500 cède 4,77% et le Nasdaq 5,48%.
Les marchés européens ont mieux résisté que Wall Street mais dans l’ensemble, la semaine fut maussade sauf pour les valeurs bancaires qui profitent de la hausse des taux. La résilience des indices européens a de quoi surprendre. Elle tranche par rapport aux pronostics pessimistes sur les économies de l’eurozone, tels ceux du géant BlackRock qui prévoit une récession sévère sur le continent. Les investisseurs tardent-ils à prendre conscience de la gravité de la situation ou espèrent-ils que l’Europe passera l’hiver sans encombres? En tout état de cause, l’indice Stoxx 600 ne recule que de 2,89%. Dopées par les réformes annoncées par le gouvernement Truss, les valeurs britanniques s’en sortent encore mieux. Le FTSE 100 n’a cédé que 1,56%.
US : l’inflation s’incruste.
8,3% sur une année et 6,3% sans tenir compte des produits alimentaires et de l’énergie. Les mauvais chiffres de l’inflation aux Etats-Unis donnent raison à ceux qui affirment que la hausse des prix ne disparaîtra pas de sitôt. Même dans l’éventualité où elle n’est plus éloignée de son pic, l’inflation risque de se maintenir à des niveaux élevés du fait de sa propagation au secteur des services. En août, la baisse du prix de l’essence et des tarifs aériens a été largement compensée par la hausse continue des produits alimentaires, des transports, des prix liés au logement et aux soins de santé. Un exemple : le tarif des assurances-santé a progressé de 24% en un an.
4% minimum en fin d’année.
Depuis la publication des chiffres de l’inflation, c’est désormais une quasi-certitude. La Fed relèvera son taux directeur de 0,75% la semaine prochaine, ce qui le portera dans la fourchette 3%-3,25%. Deux hausses supplémentaires sont à prévoir avant la fin de l’année comme le suggère le taux des Bons du Trésor à 2 ans, qui frôle les 3,90%. C’est près d’un demi-point de plus que les Bons à 10 ans. Un consensus se dégage pour prédire une nouvelle hausse de 0,75% en novembre et les 4% seraient atteints ou dépassés à la fin de l’année. En revanche, si l’on en croit les indications des marchés, les investisseurs prévoient une baisse des taux en 2023, probablement au courant du deuxième semestre.
Le dollar, champion toutes catégories.
Le billet vert est au plus haut depuis 37 ans face à la livre sterling et au plus haut depuis 24 ans face au yen. Il a progressé de 14% face à un panier composé des principales devises (indice DXY). A moins d’une baisse des taux d’intérêt, qui n’est pas attendue avant la mi-2023 ou d’une récession sévère à l’échelle globale, le dollar devrait poursuivre son ascension. Pour les économistes de Citibank, le dollar devrait encore progresser de 2% ces trois prochains mois.
L’Europe s’habille pour l’hiver.
Ursula von der Leyen a dévoilé le plan de la Commission pour résoudre la crise de l’énergie. Elle propose de prélever 180 milliards d’euros sur les profits réalisés par les fournisseurs d’électricité qui tirent leur production des énergies renouvelables. Ceux-ci bénéficient du fait que le prix de l’électricité est aligné sur celui du gaz alors que leurs coûts de production sont largement inférieurs. Le prix de l’électricité serait plafonné à 180€/MWh. Il s’agirait d’une première étape vers un découplage des prix du gaz et de l’électricité. La proposition sera discutée le 30 septembre par les Etats membres. Il est également question de plafonner le prix du gaz mais cette proposition fait débat. La Norvège, principal fournisseur européen de gaz y est opposée. Elle préconise plutôt de signer des contrats à long terme afin de stabiliser les prix. La Commission s’interroge également sur le marché à terme TTF d’Amsterdam qui sert de référence au prix du gaz. Celui-ci n’est plus représentatif car il ne tient pas compte du GNL. Enfin, les 27 devraient se mettre d’accord pour réduire de 10% la consommation totale d’électricité cet hiver et de 5% pendant les heures de pointe.
Russie-Chine : partenaires mais pas alliés.
C’est un Poutine affaibli et en quête de soutiens qui s’est rendu à Samarcande (Ouzbékistan), à l’occasion du 22ème sommet de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) auquel participe le gratin des puissances asiatiques : le chinois Xi Jinping, l’indien Narendra Modi, le turc Recep Tayyip Erdogan et l’iranien Ebrahim Raïssi. Poutine a admis comprendre « les interrogations et les inquiétudes » de ses interlocuteurs et a déclaré vouloir terminer la guerre en Ukraine « le plus vite possible ». Comme de coutume, la Chine pratique un double jeu conforme à ses intérêts à court et à long terme. D’une part, elle souhaite un ordre international « plus juste et plus rationnel », dans lequel elle tiendrait le rôle central à la place des Etats-Unis. Mais d’autre part, elle ne veut pas se couper de l’Occident avec lequel elle entretient des relations commerciales bien plus importantes qu’avec la Russie. Pour l’heure, l’Occident reste le pilier essentiel de son développement. Elle a besoin de ses ressources technologiques et de ses capitaux.
Malgré « l’amitié sans limites » qui lie les deux grandes puissances, la Chine se contente donc de profiter de la situation en avançant ses pions en Asie tout en se gardant bien d’aider militairement la Russie et de violer les sanctions. En attendant, ses liens économiques avec Moscou se renforcent. La Chine est désormais le premier client de la Russie pour le gaz et le pétrole. Le gazoduc « Force de Sibérie 2 » reliant le bassin de Yamal à la Chine remplacera bientôt le gazoduc défunt Nord Stream 2 vers l’Europe. Dans l’autre sens, les voitures, téléphones et semi-conducteurs chinois déferlent en Russie. Au deuxième trimestre, 81% des voitures importées étaient chinoises et depuis le retrait d’Apple et de Samsung, Xiaomi est devenue la marque de smartphones la plus vendue en Russie. Autre preuve de la présence chinoise, 20% des transactions en devises sur la bourse de Moscou se font désormais en yuan.
La France réduit la voilure.
2023, le gouvernement français limitera à 15% la hausse des prix sur les factures d’énergie des ménages. Des chèques énergie de 100 et 200 euros seront en outre versés à 12 millions de foyers modestes d’ici la fin de l’année et les PME dont le chiffre d’affaires est inférieur à un million d’euros continueront à bénéficier de tarifs réglementés de l’énergie. Le bouclier tarifaire 2023 coûtera 16 milliards à l’Etat. Il est moins favorable que l’actuel car la France ne veut pas plomber son déficit. Celui-ci doit rester sous la barre des 5% du PIB en 2023 pour revenir ensuite à 3% en 2027. Il s’agit aussi d’inciter les Français à réduire leur consommation d’énergie. Les objectifs de Bruno Le Maire seront difficiles à tenir car le gouvernement français a abaissé à 1% ses prévisions de croissance pour 2023. Un chiffre lui-même contesté par la Banque de France, qui ne table plus que sur une croissance moyenne de 0,5%. Pour rester dans les clous budgétaires, le gouvernement Borne renonce provisoirement à baisser les droits de succession et supprimera la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (l’impôt de production) en deux ans et non dès l’année prochaine comme il l’avait promis. Au grand mécontentement des patrons.
Les Etats reprennent la main.
Comme ce fut le cas de certaines banques lors de la crise financière de 2008, les Etats n’hésitent plus à prendre le contrôle des entreprises énergétiques mal en point. C’est le cas d’EDF dont la nationalisation a été annoncée en juillet par le gouvernement français. De son côté, L’Etat allemand qui avait pris une participation de 30% dans Uniper, envisage de prendre le contrôle du géant de l’énergie. Il s’agit d’éviter à tout prix une faillite, susceptible de provoquer un « effet Lehman Brothers » sur les marchés de l’énergie. Uniper était le principal client de Gazprom en Allemagne avant que la firme russe ne ferme le gazoduc Nord Stream 1. Pour honorer ses contrats, Uniper est désormais contraint de se fournir sur le marché au comptant où les prix du gaz ont explosé. En août, la firme affichait déjà un trou financier de 5 milliards. Après la mise sous tutelle de Gazprom Germania en avril, l’Allemagne vient également de saisir les activités du pétrolier russe Rosneft sur son territoire. Elle prend ainsi le contrôle de trois grandes raffineries, représentant 12% des capacités de raffinage du pays.
Une bonne nouvelle pour changer.
Le Covid-19 est sur une pente déclinante. Lors de la semaine du 5 septembre, le nombre de décès dans le monde était le plus faible depuis mars 2000. Selon l’OMS, la « fin de la pandémie est en vue ». On le doit pour une grande part à la vaccination, qui aurait permis de sauver près de 20 millions de vies.
L’action de la semaine.
Trois entreprises ont défrayé la chronique la semaine dernière, chacune à leur façon. Le titre FedEx a chuté de 21,5% vendredi après l’annonce d’une diminution sensible du volume de colis acheminés tant aux Etats-Unis qu’à l’international. Cette nouvelle est significative dans la mesure où les transporteurs comme FedEx ou UPS sont des baromètres de l’activité économique.
Une belle success story est celle de la startup américaine Figma, dont l’application de design collaboratif s’arrache depuis le confinement et le télétravail obligatoire. Redoutant un rival capable de lui pendre des parts de marché, le spécialiste de logiciels graphiques Adobe a préféré l’acquérir pour la modique somme de 20 milliards de dollars, moitié en cash et moitié en actions. Soit deux fois sa valorisation lors du dernier tour de table qui avait permis à Figma de récolter 200 millions de dollars. Un beau coup pour Dylan Field, son fondateur âgé d’à peine 30 ans, qui a abandonné ses études de maths et d’informatique contre l’avis de ses parents pour lancer sa startup grâce à une bourse accordée par Peter Thiel. Les analystes ont estimé qu’Adobe avait surpayé Figma et le titre a dévissé de 24% cette semaine.
On a également appris que Equinor, le géant de l’énergie norvégien, a définitivement arrêté ses activités en Russie en renonçant à sa joint-venture avec Rosneft. Equinor aurait été libéré de ses engagements vis-à-vis de Rosneft en échange d’un euro symbolique. Un porte-parole d'Equinor a déclaré que sa sortie du partenariat avec Rosneft était "neutre". Rien qu’au premier semestre, les profits d’Equinor dépassaient 10 milliards d’euros après impôts et le titre est en hausse de 51% cette année.