L’inflation recule, la Chine fait demi-tour, les bourses avancent. Le résumé de la semaine.
Goldwasser Exchange fait le point sur ce qu’il faut savoir pour commencer la semaine.
Les marchés font du zig-zag.
Plutôt bien orientées, les bourses ont terminé la semaine en légère progression. A Wall Street, les investisseurs ont bien accueilli l’annonce d’un assouplissement des mesures anti-Covid en Chine mais c’est surtout la conférence de presse de Jerome Powell qui les a mis dans de bonnes dispositions. Le patron de la Fed a confirmé que la hausse des taux serait plus modérée à l’avenir et il a laissé entendre que cette décélération pourrait commencer dès le 15 décembre. Rien de nouveau sous le soleil – les marchés tablaient déjà sur une hausse moins forte de 0,5% - mais en ce moment, les investisseurs veulent surtout voir le verre à moitié plein. La hausse moins importante que prévue de l’indice des prix PCI de novembre semble indiquer que l’inflation a passé son pic. Mais comme rien n’est simple, les chiffres de l’emploi publiés vendredi montrent que l’activité US reste très forte et que le salaire moyen progresse au delà des attentes, ce qui n’est pas une bonne nouvelle pour l’inflation. Le ralentissement attendu des taux directeurs US favorise l’euro qui a atteint 1,0534 dollar vendredi à la clôture. Le cours du pétrole est en hausse en raison d’une probable réduction de l’output qui sera annoncée la semaine prochaine lors de la réunion de l’OPEP+.
Zone euro: inflation en baisse.
Elle a régressé à 10% en novembre contre 10,6% en octobre. C’est le premier recul de l’inflation depuis 17 mois. Les disparités sont toujours aussi grandes entre pays. L’Espagne affiche un taux de 6,6% contre 11,3% en Allemagne et 12,5% en Italie, ces deux derniers pays étant particulièrement dépendants de sources extérieures d’énergie. Ce chiffre est dû avant tout à la baisse des prix de l’énergie, une composante qui n’intervient plus qu’à 34,9% dans la hausse des prix contre 41,5% en octobre. Hors énergie, alimentation, alcool et tabac, l’inflation atteint 5%, un chiffre conforme aux attentes. Ce ralentissement du rythme de l’inflation est un signe positif mais une seule hirondelle ne fait pas le printemps. On peut s’attendre à voir souffler des vents contraires. Le prix du gaz naturel sur le marché à terme d’Amsterdam grimpe à nouveau et le cartel de l’OPEP+ va sans doute réduire sa production de pétrole afin de maintenir le prix du baril au dessus des 100 dollars. Un ralentissement prolongé du secteur manufacturier chinois - qui fabrique 30% des biens destinés à la planète - pourrait créer de nouveaux problèmes d’approvisionnement et faire monter les prix des marchandises. Enfin, le chômage a atteint son plus bas historique en zone euro (6,5%), ce qui contribue à soutenir les salaires et donc à nourrir l’inflation.
2023 dans une boule de cristal.
C’est la coutume. La fin de l’année approche et en guise d’étrennes, les grandes banques d’investissement font part de leurs prédictions pour 2023. On les découvre comme le calendrier de l’avent. Morgan Stanley, par exemple, table sur un taux d’intérêt maximal US de 4,50-4,75% dès janvier. Celui-ci se maintiendra à ce niveau toute l’année et baissera en 2024. La banque prévoit un atterrissage en douceur de l’économie américaine accompagné d’une croissance molle (0,5%). En zone euro, la croissance sera légèrement négative (-0,2%) et le taux de base atteindra 2,5% lors du premier trimestre pour rebaisser ensuite en 2024. De son côté, Goldman Sachs prévoit une récession cet hiver en zone euro mais au total, la croissance ne sera que légèrement négative (-0,1%) en 2023. Le taux directeur atteindra 3% en mai 2023 et rebaissera en 2024. Goldman Sachs est un peu plus optimiste sur la croissance US en 2023 (+1%) et prévoit un taux d’intérêt terminal de 5%-5,25% en mai. Toutes les banques estiment que le pic autour de 5% sera atteint lors du premier semestre et que ce taux perdurera tout au long de 2023. En ce qui concerne la bourse, Goldman Sachs table sur un indice S&P 500 à 4.000 à la fin 2023 tout comme Bank of America. Morgan Stanley prévoit 3.900. Pour JPMorgan, le S&P 500 re-testera le niveau le plus bas de 2022 (3.500) pour finir l’année à 4.200. Il vaut actuellement 4.071. Peu de changement, donc. Pour ce qui concerne les devises, les 11 banques consultées voient l’euro au dessus de la barre du dollar. Cela va de la parité (JPMorgan) à 1,15 dollar (Citi). L’an dernier, aucune de ces banques n’avaient prévu la possibilité d’une guerre en Ukraine alors que les responsables américains faisaient part de leurs soupçons dès novembre 2021. Qu’en sera-t-il en 2023? Un autre conflit est-il envisageable? L’Iran est peut-être un candidat.
2023: année de la Chine?
Les 11 banques sont unanimes sur un point: la croissance chinoise sera plus forte en 2023 qu’en 2022. Les chiffres varient entre +3,8% (Barclays) et +5,6% (Citi). L’assouplissement des mesures anti-Covid, le soutien des banques publiques au secteur immobilier défaillant et l’amélioration des relations avec les Etats-Unis sont généralement invoqués pour justifier ce regain d’optimisme. Pour les économistes de Bloomberg, les mesures sanitaires qui handicapent l’économie chinoise depuis plus d’un an seront totalement levées au deuxième trimestre 2023, après la session parlementaire de printemps. Cette évolution, dont on constate les prémisses depuis quelques jours, est devenue nécessaire car plus d’un quart du PIB chinois est affecté d’une manière ou d’une autre par les lockdowns, les restrictions de déplacement et les tests à répétition. Pour l’heure, l’économie chinoise est dans le rouge. La production industrielle est en recul depuis deux mois. Les ventes de détail aussi. Les exportations ont baissé en octobre et le prix des logements neufs est en chute depuis le mois de mai. Plus grave encore, le chômage touche près de 20% des Chinois de moins de 24 ans, contre 5,5% dans la population en général. Beaucoup de jeunes cherchent un emploi dans les services, un secteur particulièrement touché par les restrictions.
La volte-face de Xi.
Face aux protestations de la population et aux manifestations inédites depuis Tiananmen, le pouvoir chinois a fini par comprendre que la stratégie zéro-Covid appliquée d’une main de fer était inopérante. Quelques cas de Covid ne justifient pas la paralysie d’une partie du pays. Le vice-premier ministre Sun Chunlan a par conséquent déclaré que la lutte contre le virus “entrait dans une nouvelle phase”. Le variant omicron, moins létal “permet plus de souplesse” aurait confié Xi Jinping à la délégation européenne dirigée par Charles Michel. Ces derniers jours, les restrictions ont donc été partiellement levées dans les grandes villes du pays, les personnes les plus vulnérables ont été vaccinées et le système hospitalier a été renforcé. Les investisseurs avaient d’ailleurs anticipé les changements en cours. Après avoir plongé depuis quelques mois, l’indice MSCI China a rebondi de 24% en novembre, sa meilleure performance depuis 1999. La place de Hong Kong, de plus en plus menacée par Singapour, a également repris du mordant avec un indice Hang Seng en hausse de 16%.
Le pétrole russe plafonné.
Les pays de l’UE, du G7 ainsi que l’Australie sont finalement tombés d’accord sur un plafonnement du prix du pétrole brut russe acheminé par voie maritime. En résumé, ils refuseront de fournir des tankers et d’assurer le transport à quiconque achète du pétrole russe au delà de 60 dollars le baril. Cet accord est flexible: le consortium de pays se réserve le droit de modifier ce prix tous les deux mois en fonction de l’évolution des cours du brut. La fixation du prix a fait l’objet de négociations serrées. La Pologne était en faveur d’un seuil de 30 dollars/baril, proche des coûts de production, afin de sanctionner veritablement la Russie. Mais d’autres pays, dont les Etats-Unis craignaient qu’un seuil trop bas ne fasse monter le cours du pétrole en créant les conditions d’une pénurie. L’UE et le G7 imposant un quasi embargo sur le pétrole russe, ce plafonnement concerne surtout les pays tiers et notamment les gros acheteurs que sont l’Inde, la Chine, les pays du Golfe et la Turquie. Serguei Lavrov a d’ores et déjà déclaré: “Nos partenaires qui travaillent avec nous ne tiendront pas compte de ce plafonnement”. Selon le Financial Times, les Russes auraient acquis une “flotte fantôme” de plus de cent navires pour contourner la sanction. Des critiques font valoir que le prix de 60 dollars rate sa cible car le pétrole russe de variété “Ural” se négocie actuellement en dessous de ce seuil. Et comme les compagnies russes gagnent de l’argent à partir de 40-45 dollars, elles continueront à faire du profit sur lequel l’Etat prélèvera sa dîme pour l’investir dans son effort de guerre.
L’obligation de la semaine.
Pour financer son développement, le géant du commerce électronique Amazon a émis cinq nouvelles obligations dont les échéances vont de 2024 à 2032. Elles sont proposées en coupures de 2.000 dollars. L’obligation arrivant à maturité le 1er décembre 2029 est proposée à 99,82% du nominal et son coupon s’élève à 4,65%, ce qui correspond à un rendement brut de 4,68% l’an. Celle qui arrive à échéance le 1er décembre 2032 offre un rendement brut de 4,70%. Elles ont toutes obtenu la garantie “investment grade” par les trois principales agences de notation: A1 chez Moody’s, AA chez Standard & Poor’s et AA- chez Fitch. Leader mondial dans le domaine du e-commerce, Amazon est également n°1 dans celui du “Cloud computing” grâce à sa très profitable division Amazon Web Services (AWS). Elle tire également d’importants revenus de la publicité et du streaming vidéo. En 2021, son chiffre d’affaires s’élevait à 469,8 milliards de dollars, en hausse de 22% par rapport à 2020.
L’action de la semaine.
Il a été beaucoup question d’une percée significative dans le domaine de la lutte contre la maladie d’Alzheimer, qui touche près de 140.000 personnes rien qu’en Belgique (estimation 2018). Fruit de la collaboration entre la biotech américaine Biogen et le fabricant japonais Eisai, le lecanemab permettrait de réduire de 27% le déclin cognitif des patients. Ce résultat encourageant a été obtenu suite à une étude clinique (phase 3) menée pendant 18 mois sur une cohorte de 1800 personnes. Le lecanemab, qui s’attaque à la formation des plaques bêta-amyloïdes, responsables de la destruction progressive des cellules dans le cerveau, n’est pas un remède-miracle pour autant car son administration s’accompagne d’effets secondaires, parfois sévères. Il y a plus d’un an, Biogen et Eisai avaient fait naître de faux espoirs avec l’aduhelm (aducanumab), qui, après avoir été approuvé aux Etats-Unis dans des conditions discutables, s’est révélé être un échec. Si la mise sur le marché du lecanemab est autorisée, ce serait un succès important pour les deux firmes. Un analyste de JPMorgan estime que ce traitement pourrait leur rapporter jusqu’à 10 milliards de dollars par an. Elles ne seront sans doute pas seules sur ce créneau car de son côté, Eli Lilly va effectuer en 2023 des essais cliniques phase 3 pour un autre traitement anti-amiloïde, le donanemab. Et ceci sans compter que 75% des 140 traitements potentiels contre Alzheimer ciblent plutôt d’autres aspects de la maladie.
La concurrence risque également d’être rude dans un autre domaine, celui de la lutte contre l’obésité. La pharmaceutique danoise Novo Nordisk, leader dans le traitement du diabète et premier producteur mondial de médicaments à base d’insuline, n’arrive pas à suivre la demande pour le Wegovy (sémaglutide), son médicament injectable contre l’obésité. Les essais cliniques ont montré qu’il permettait de réduire la surcharge pondérale de 15% en l’espace de 13 à 17 mois. Comme dans le cas du Mounjaro (tirzépatide) de la compagnie Eli Lilly, le Wegovy était à l’origine un médicament contre le diabète de type 2. Depuis la découverte des propriétés coupe-faim de ces anti-diabétiques, c’est la ruée vers l’or. On estime que ce créneau pourrait rapporter 50 milliards de dollars par an et d’après la banque Morgan Stanley, Novo Nordisk et Eli Lilly contrôleront à elles deux 40% de ce marché.